Quelques réflexions en matière de droit opérationnel (règles d’engagement)

Les règles d’engagement (RoE) constituent aujourd’hui en France un domaine de réflexion et de discussion que les acteurs du jeu politique ou militaire hésitent de moins en moins à investir même en l’absence d’expérience vécue en matière de gestion juridique ou opérationnelle de ces règles. On verra probablement un jour prochain nos responsables politiques en disserter avec la presse, à l’exemple de ce qui se passe aux Etats-Unis, et mettre ainsi en évidence, de manière concrète, le principe démocratique du contrôle du pouvoir civil élu sur l’autorité militaire.
Les questions que ces règles soulèvent ne se posent réellement que depuis l’émergence du droit humanitaire et du droit de la guerre, potentialisée par l’avènement d’une société mondiale de l’information, mais sont également intimement liées à la séparation de fait du pouvoir politique et du pouvoir militaire.
Du côté du pouvoir politique, désormais civil, et ainsi depuis que le chef d’Etat n’assure plus en personne la conduite, non seulement de la guerre mais aussi des opérations réelles sur le champ de bataille, il est devenu nécessaire de trouver un moyen d’orienter et de fixer des limites permanentes ou temporaires à l’usage de la force militaire en fonction de considérations politiques et stratégiques qui ne peuvent dans un pays démocratique être confiées aux seuls militaires. Par ailleurs, et en dépit des formes diverses de censure qui affectent le compte-rendu télévisuel des opérations dans le cadre d’une véritable guerre de l’information, il n’est plus envisageable politiquement de ne pas s’intéresser à la question des dommages collatéraux et à la façon dont l’opinion mondiale réagira à telle ou telle opération de bombardement, ou de détention par exemple, ce qui conduit le pouvoir civil à très légitimement refuser tout blanc-seing aux militaires.
De leur côté, dans le cadre de missions très diversifiées, les décideurs militaires les plus éclairés ont conscience que le respect des RoE permet de satisfaire les buts stratégiques d’une opération, comme de l’intérêt que présente l’élimination ou la réduction des incertitudes sur l’usage de la force aux différents niveaux de la chaîne de commandement. Ils n’ignorent pas non plus que l’adoption de RoE clairement définies et modifiables permet de se garder d’au moins certaines des incursions intempestives du pouvoir civil dans la gestion des opérations, compte tenu de la nécessaire formalisation des échanges en la matière.
La réflexion qui suit conduit à mettre en évidence les conditions de la synthèse à effectuer nécessairement entre considérations opérationnelles, juridiques, politiques et diplomatiques pour la rédaction et la mise en œuvre de RoE adaptées. Nous serons ainsi amenés successivement à définir les RoE, à les rapporter au droit applicable, à la gestion des opérations, aux considérations politiques/diplomatiques et d’information publique.
En second lieu, et de manière plus juridique, seront abordés les questions essentielles que posent les RoE au juge pénal et au juge administratif.
En dernier lieu les conséquences en matière opérationnelle des obligations posées par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales feront l’objet d’une brève évaluation.
1. Définition
1.1 Définition interne[1]:
Pour plus de clarté, il convient de distinguer dès l’origine, dans la définition, les RoE comme normes à l’état individuel, puis comme jeu de normes applicables en un temps et un endroit donné et enfin comme le corps de toutes les RoE théoriquement applicables :
- La description d’un objectif ou de circonstances d’intérêt militaire et la définition corrélative du niveau maximum autorisé d’action ou de réaction militaire à appliquer constituent une règle d’engagement ;
L’objet des RoE ne se résume pas à la définition des conditions d’usage de la force. En effet de nombreuses règles n’ont trait qu’au positionnement des forces, à l’identification de la menace ou des objectifs, à l’usage de moyens de défense (ECM), aux sommations et avertissements, c’est à dire à des circonstances où la force n’est pas appliquée, dans le cadre de mesures simplement préparatoires qui n’augurent pas nécessairement de l’usage ultérieur de la force.
- La liste des règles d’engagement dont l’application est autorisée par le pouvoir politique, dans un contexte stratégique, juridique, géographique et temporel défini, sur proposition de l’autorité militaire qui la diffuse, constitue un profil (ou jeu) de règles d’engagement ;
- L’ensemble des règles d’engagement théoriquement autorisées compte tenu des dispositions de droit international public et de droit interne applicables à l’activité des forces armées, constitue le corps des règles d’engagement duquel sont tirés en tant que de besoin les profils.
Cette proposition de définition réduit l’ambiguïté des définitions existantes quant au contenu des rôles respectifs de l’autorité militaire et du pouvoir politique en rappelant qu’en la matière, l’un propose compte tenu de l’évaluation des besoins stratégiques et opérationnels qu’il effectue, et que l’autre décide, compte tenu d’autres considérations. Elle permet de manifester de manière claire le contrôle du pouvoir civil sur l’autorité militaire, laquelle contribue cependant de manière éminente à la définition et à l’autorisation de mise en application d’un profil de RoE.
1.2 Définition externe
1.2.1 Les corps ou profils de RoE élaborés au niveau international ont-ils le statut d’un instrument juridique international contraignant ?
A cette question la réponse est clairement négative. Même si de nombreux corps ou profils de RoE ont vu le jour[2] ou ont été validés au sein d’instances multinationales ou internationales, aucune de ces validations ou agréments n’a pris la forme d’un instrument international juridiquement contraignant, susceptible d’entrer dans l’ordre juridique interne des parties et d’y produire des effets en dehors de la volonté des parties.
Ce ne sont donc que des modèles qui visent à servir de base à l’élaboration des règles d’engagement ; ils ne sont par ailleurs aucunement exhaustifs.
1.2.2 Les RoE ont-elles un statut défini en droit interne ?
La situation française n’a en cela rien d’exceptionnel mais on peut dire que la place des RoE dans la hiérarchie juridique des textes n’est pas définie ou connue de manière satisfaisante. En droit interne, les RoE ne sont prévues par des textes de niveau législatif[3] ou réglementaire que de manière exceptionnelle. Leur positionnement en fait plus généralement des normes assimilables à un règlement professionnel ou à une simple instruction, de niveau infra-réglementaire par nature.
Faute de statut normatif précis assigné aux RoE, les RoE n’ont donc, en principe, que le caractère d’un texte interne au ministère[4] en dépit de la validation de principe par le Président de la République des jeux de règles applicables à telle ou telle opération[5].
1.2.3 Eléments de compréhension systémique
Si le corps des RoE (cf supra 1.1.1) applicable à l’activité des forces armées se situe dans une relation de conformité complète vis-à-vis du droit des conflits armés[6], le jeu (ou profil) de RoE –tiré du corps précédemment cité-, développé pour une opération, résulte des influences combinées des objectifs de politique extérieure, des objectifs de communication, des nécessités et objectifs opérationnels.
Légende :
ou : relation de conformité
ou : relation d’influence réciproque
Conformité juridique des RoE :
Rédiger un profil de RoE ne consiste pas à rappeler les obligations des acteurs des opérations en fonction du droit applicable. Il est en revanche indispensable de s’assurer que l’ensemble des règles dont l’application est prévue est en conformité avec les normes impératives existantes. Cet examen peut comprendre, en fonction des situations, la prise en considération de la Charte des Nations Unies, de mandats du Conseil de Sécurité des Nations Unies, des Conventions de la Haye et de Genève, des Protocoles Additionnels, de tout autre instrument juridique de droit international limitant ou interdisant l’usage de certains armements, mais on peut également songer à la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales (CEDH) dans certaines hypothèses.
Ainsi, la France s’étant interdit l’usage des mines anti-personnel en ratifiant la Convention d’Ottawa, les RoE relatives à la pose ou à l’usage en général de ces mines ne peuvent sans illégalité régir l’activité opérationnelle des militaires français.
Cette nécessaire conformité des règles d’engagement avec les normes de valeurs supérieures non seulement internationales mais aussi nationales peut conduire, pour les ROE établies dans un cadre multinational, à la mise en place de restrictions nationales, autrement appelées caveats.
Interaction entre opérations et RoE :
En premier lieu, les RoE doivent être rédigées en tenant compte des capacités opérationnelles existantes : il ne conviendrait pas d’imposer à un pilote de combat, au sein des règles relatives à l’identification ami/ennemi, de n’engager un aéronef que dans la mesure où le dispositif NCTR (Non Cooperative Target Recognition) conduit à la certitude que l’on a affaire à un hostile, si son aéronef ne dispose pas de ce dispositif. Et les règles d’engagement connues mentionnent donc uniquement des généralités en matière d’identification.
En second lieu, la diffusion et les modifications éventuelles du jeu des règles applicables traduisent la prise en compte d’objectifs politiques et stratégiques et retentissent sur la conduite des opérations : ainsi, dans le cadre d’une opération de restauration de la paix et dans une situation de désescalade et de reconstitution des compétences d’une police civile, il ne pourra naturellement que très difficilement être envisagé de confier des pouvoirs d’arrestation élargis aux personnels militaires, ce qui déterminera très concrètement le spectre des opérations.
Conformité aux objectifs de politique extérieure :
Les risques encourus quand les considérations de politique extérieure prennent le pas sur d’autres considérations ne peuvent être mieux décrites que par un exemple tiré de la guerre américaine au Vietnam : les Nord-Vietnamiens bâtissant des sites de SAM, le commandant (général J.H. Moore) de la Seventh Air Force demanda l’autorisation de les détruire avant leur mise en service opérationnelle au nom du risque encouru par les aviateurs. L’ Assistant Secretary of Defence for International Affairs John McNaughton refusa net : « You don't think the North Vietnamese are going to use them! Putting them in is just a political ploy by the Russians to appease Hanoi. ». Il ajouta que c’était là simplement une question d’affichage et termina par « We won't bomb the SAM sites, which signals to North Vietnam not to use them. » Une semaine plus tard, l’USAF perdait son premier aéronef du fait d’un tir de missile[7].
Cependant, le contrôle politique et civil sur l’activité des forces armées est évidemment un élément essentiel du processus démocratique et les RoE applicables à tel ou tel conflit peuvent, doivent être, et sont rédigées pour garantir le soutien de l’opinion publique nationale ou internationale à l’activité opérationnelle.
Influence des contraintes de communication :
Ce soutien, dans une nation démocratique, est nécessaire pour parvenir à la réalisation des objectifs militaires d’une opération. A titre d’exemple, s’agissant de la campagne aérienne en ex-Yougoslavie, les indications données aux états-majors sur les précautions à prendre les ont conduits à renoncer aux bombardements quand ceux-ci apparaissaient préjudiciables aux civils (plus en terme de ciblage que de RoE), donc au delà des exigences strictes du droit des conflits armés. Le développement des frappes de précision répond ainsi à un double objectif d’efficacité et d’efficience opérationnelle d’une part et de réduction des dégâts collatéraux, de plus en plus insupportables pour l’opinion publique d’autre part.
Contrairement à certaines idées reçues, les ROE sont donc bien loin d’être édictées en fonction des seules considérations juridiques. D’où le rôle limité du conseiller juridique dans la rédaction de ces directives, mais indispensable dans la vérification de leur conformité au droit.
1.2.4 Eléments de définition négative
Les RoE ne constituent pas et ne doivent pas servir à donner des instructions tactiques. Celles-ci, telle que la délimitation d’une ROZ par exemple, ne peuvent figurer que dans des SOPs.
Par ailleurs, les RoE ne doivent pas servir à définir pas les procédures ou la doctrine des armées, qui relèvent d’autres documents généraux et non spécifiques à une opération, a contrario des RoE.
Les RoE ne sont pas davantage des règles du seul temps de guerre ou des seuls théâtres d’opérations extérieures, car il existe bien, en temps de paix, des RoE, que ce soit sur le territoire national (mission de sûreté aérienne, dispositif particuliers de sûreté aérienne..) ou lors de missions se déroulant à l’extérieur du territoire national (opérations de maintien de la paix par exemple).
Enfin, il n’est pas inutile de rappeler les RoE ne préjugent pas et n’apportent pas de limitation au droit de légitime défense selon l’acception qu’en fait le droit national applicable[8]. Les ROE visent en effet à définir des règles permettant l’accomplissement de la mission, alors que la légitime défense est un droit inhérent aux individus qui transcende les seules nécessités de la mission.
1.3 Synergie Il convient dès le temps de paix de favoriser et d’organiser la collaboration des états-majors et directions concernés pour la rédaction de jeux de RoE qui prennent en compte les exigences mentionnées plus haut. Il convient également de noter que ce dialogue et ce processus se nouent et s’exécutent plus aisément en dehors du temps de crise et supposent des délais d’examen non négligeables, peu compatibles là encore avec les exigences de la gestion de crise. La planification « à froid » doit comprendre par provision la réalisation d’un profil de RoE.
On l’a vu plus haut, les RoE n’ont aucune autonomie et leur conformité au droit applicable constitue un impératif catégorique. Il convient maintenant de tenter de détailler les relations qui se nouent entre droit pénal, droit administratif et RoE.
2. les RoE, le juge pénal et le juge administratif
2.1 Le juge pénal et les ROEs
2.1.1 En premier lieu, la question qui se pose au juge pénal est celle de l’infraction apparente commise dans le respect des règles d’engagement
- Le respect des règles d’engagement ne protège pas le militaire d’une action au pénal…
La situation analysée ici est celle de l’infraction apparente commise dans le respect des RoE, c’est à dire en admettant que la mise en œuvre des moyens militaires a correspondu aux conditions prévues par le profil de RoE en vigueur. Elle doit être distinguée de celle des violations graves du droit des conflits armés. Ainsi l’assassinat de civils pendant un conflit constitue une violation grave, cette infraction supposant qu’à dessein, un ou des civils ont été spécifiquement désignés et abattus en usant de moyens militaires. En revanche, le décès de civils au cours du bombardement d’un objectif militaire dont la destruction fait naître un avantage militaire précis, sous condition de proportionnalité, est uniquement constitutif de dommages collatéraux.[9]
Supposons donc un dommage causé à personnes (le problème se pose dans des termes à peu près identiques pour des dommages aux biens) au cours d’une action de force conforme aux RoE. Dans un tel cas en présence de victimes et donc même en l’absence de violation grave du droit des conflits armés, des poursuites du chef d’homicide volontaire ou par imprudence, ou de coups et blessures ayant entraîné la mort sans l’intention de la donner ou encore de mise en danger de la vie d’autrui, peuvent être théoriquement engagées[10].
De même, le juge pénal se reconnaîtrait certainement compétent pour apprécier la légalité d’un profil de RoE qui n’autoriserait pas, à certaines conditions, un militaire à intervenir pour empêcher la commission d’un crime ou un délit contre l’intégrité corporelle d’une personne et pourrait conduire ce militaire respectant les RoE à se rendre coupable du délit réprimé par l’article 223-6 du NCP (non assistance à personne en péril[11]). Dans ces conditions, il convient de vérifier systématiquement la rédaction et la mise en application des règles d’engagement OTAN suivantes dont on comprend à la seule lecture qu’elles pourraient être directement contraires au droit pénal français en fonction de leur rédaction ou même en leur seule absence :
« 332. Use of minimum/DESIGNATED force to defend DESIGNATED non-NATO forces/personnel in DESIGNATED circumstances is authorised.
337. Use of minimum/DESIGNATED force to prevent commission of DESIGNATED crimes that are occurring or are about to occur in DESIGNATED circumstances is authorised. ».
L’action ou l’inaction illégale mais réalisée en conformité avec les RoE applicables, peut-elle conduire à condamnation au pénal ? La réponse est évidemment positive car, en vertu du principe de plénitude de juridiction, des simples directives ne sauraient relever le juge répressif du devoir qui lui incombe d’appliquer la loi pénale[12].
Sera donc seule soumise au débat judiciaire la question de savoir si les actions menées dans le cadre des RoE bénéficient d’une cause d’exonération ou d’un fait justificatif.
On en revient donc ici à l’examen des contraintes légales qui pèsent sur les dépositaires de la force armée, et de ce point de vue le droit pénal français offre des garanties certaines :
- … sauf existence d’une cause d’irresponsabilité ou d’atténuation de la responsabilité.
Le droit pénal français reconnaît plusieurs causes permettant soit de faire disparaître l’infraction soit de faire disparaître ou d’atténuer la responsabilité de son auteur :
- L’erreur de droit (122-3 NCP). Bien qu’aucune décision judiciaire ne soit à ma connaissance intervenue dans ce domaine, rien n’interdit de penser que, dans le cas où un militaire français a dans le respect des RoE en vigueur commis un crime ou un délit punissable, le profil de RoE n’étant par hypothèse pas en conformité avec le droit français[13], ce militaire puisse plaider l’erreur de droit et obtenir la relaxe.
On peut prévoir une illustration théorique de ce type de situation en supposant que la « carte du soldat » remise à une sentinelle lui interdise de mettre fin à des violences en réunion qui se déroulent sous ses yeux au prétexte que la règle 332 (citée plus haut) en vigueur n’autorise pas les militaires présents à défendre des civils pris à partie. Ce, sauf à considérer que la règle est manifestement illégale.
- L’ordre de la loi, du règlement ou de l’autorité légitime (122-4 NCP). Cet article dispose qu’est pénalement exonéré celui qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires. L’exonération est également acquise pour un acte commandé par l’autorité légitime sauf si cet acte est manifestement illégal.
à L’ordre de la loi ou du règlement : dans le respect des conditions par ailleurs posées par la loi ou par le règlement, l’usage de la force est pénalement déresponsabilisé, ce qui est donc le cas pour des règles d’engagement posées par des textes de ce niveau[14].
En revanche, une simple autorisation administrative ne peut en aucun cas justifier la réalisation d’une infraction pénale[15]. Or, la validation dans la pratique française (comme dans le cadre de l’instruction[16] interministérielle) même par les plus hautes autorités de l’état des profils de RoE peut s’analyser, en l’absence d’autre statut normatif, et en vertu du principe de séparation des pouvoirs, comme une autorisation administrative, ce qui a conduit l’administration du ministère à étudier les voies et moyens requis pour faire évoluer cette situation juridiquement incertaine et a abouti à l’adoption de l’article 17.2 du statut général des militaires (L 4123-12 II du code de la défense).
De même, le respect du mandat servant de base à l’opération (résolution du Conseil de sécurité par exemple), ne peut pas non plus justifier la réalisation d’une infraction pénale au sens du droit français, car il n’est généralement pas possible pour les individus de se prévaloir directement d’instruments juridiques internationaux, sauf dans des conditions restrictives.
à Le commandement de l’autorité légitime est plus protecteur bien qu’il soit soumis au critère de l’illégalité manifeste[17]. Des instruments juridiques de niveau international, des dispositions législatives (cf 213-4 du NCP), ou la jurisprudence nient en effet le caractère de fait justificatif ou d’excuse absolutoire aux ordres manifestement illégaux[18] d’une autorité légitime. Ce système est d’ailleurs celui du règlement de discipline générale[19].
On peut donc à l’opposé raisonnablement estimer que les ordres donnés par une autorité légitime, chef des armées, chef d’état-major des armées, commandant de théâtre, commandant opérationnel entraînant des pertes humaines et des destructions sont, sous condition de proportionnalité, des causes d’exonération au pénal. Le raisonnement juridique est cependant si laborieux qu’il conduit à se prononcer ici aussi pour une formule de validation législative du système des règles d’engagement pour des règles d’engagement valables sur le territoire national.
- La légitime défense (122-5 et 122-6 NCP) constitue un fait justificatif, les divers corps de règles d’engagement stipulant systématiquement qu’en aucune manière, l’édiction de ces règles ne vient limiter le droit d’un individu (certains font là le rajout de la notion de légitime défense collective) à légitime défense. Cela signifie simplement que ce ne sont pas les RoE mais ce droit imprescriptible qui justifie qu’un militaire attaqué se défende , au besoin par un usage mortel de ses armes. Ce concept a une acception différente selon qu’on se réfère au droit français -applicable ou au droit anglo-saxon. Il n’y a pas de différence essentielle sur les critères de nécessité, de proportionnalité et d’appréciation de la légitimité de l’intérêt défendu entre ces droits. Simplement, à la différence du droit américain, le droit français exige l’actualité : « l’état de légitime défense suppose la nécessité actuelle de la défense de soi-même ou d’autrui » (Crim 21 décembre 1954), c’est à dire un commencement d’exécution de l’attaque à laquelle il est répondu. C’est là que se pose la question de l’intention hostile popularisée par le débat autour de l’illumination d’un aéronef par un radar de contrôle de tir de missiles. Cette circonstance suffit-elle en droit français à autoriser le tir d’un missile anti-radar ? la réponse n’est pas certaine, et rien ne dit qu’il ne puisse être jugé que cette action constitue une simple mesure préparatoire et non une atteinte injustifiée actuelle[20]. La limitation opérationnelle qui en résulte est levée avec l’introduction de la validation législative du système des RoE déjà mentionnée (L 4123-12 II du code de la défense qui ne mentionne pourtant pas le concept de RoE)[21] -mais uniquement à l’extérieur du territoire national- ce qui permet également de réconcilier partiellement ou de réduire les incidences, en matière opérationnelle, des différences entre concepts français et anglo-saxons.
- L’état de nécessité (122-7 NCP), c’est la situation dans laquelle se trouve une personne qui n’a d’autre solution que de commettre une infraction pour sauvegarder un intérêt supérieur (l’ordre public, la vie humaine). Ainsi, on peut penser qu’une incrimination du fait de coups et blessures volontaires (ou de violations de consigne voir plus bas) du fait de l’usage d’agents incapacitants sans l’autorisation des RoE tomberait en présence de la démonstration de ce que cet usage a permis de sauver des civils « caillassés ». Le péril, dont l’origine ne doit pas se trouver dans l’action ou l’inaction de l’auteur, doit être immédiat, injuste et il doit y être remédié, en l’absence de tout autre moyen disponible, de manière proportionnée, comme en matière de légitime défense, les juges effectuant une véritable pesée des intérêts en présence. « L’état de nécessité a dû être érigé en fait justificatif parce qu’en présence de certaines circonstances, une loi pénale n’a plus logiquement de raison d’être (…) En raison de sa nature même, l’état de nécessité doit faire l’objet d’une interprétation stricte »[22]. Cette souplesse dans l’application de la loi n’appartient qu’au juge, qui peut varier, et sort du cadre des RoE. En la mettant trop en avant, on court cependant le risque de laisser croire aux acteurs des opérations, qu’en fait, en se fiant aux principes cités, le besoin d’un corps de RoE n’est pas si évident, ce qui disqualifie les efforts fournis pour leur systématisation et leur validation.
- L’article 17-2 du statut général des militaires :
Même si les hypothèses de condamnation de militaires ayant exécuté une mission dans le strict respect des règles d’engagement étaient extrêmement rares, le risque existait toujours et créait une situation d’insécurité juridique peu confortable pour les personnels.
D’où l’introduction en droit français, en 2005, d’une nouvelle cause d’exonération pénale spécifique aux militaires : l’article 17-2 du statut général des militaires, puisqu’il prescrit que « N’est pas pénalement responsable le militaire qui, dans le respect des règles du droit international et dans le cadre d’une opération militaire se déroulant à l’extérieur du territoire français, exerce des mesures de coercition ou fait usage de la force armée ou en donne l’ordre, lorsque cela est nécessaire à l’accomplissement de la mission ».
Même s’il permet d’offrir de meilleures garanties aux militaires envoyés en opération, ce texte ne pose aucune immunité absolue puisque des conditions strictes doivent être réunies pour qu’il puisse être invoqué.
2.1.2 En deuxième lieu la question qui se pose au juge pénal est celle de la violation du contenu des RoE elles mêmes
La violation des RoE constitue-t-elle en elle même une infraction pénale ? Supposons un bombardement aérien (la réflexion en matière de RoE se prête particulièrement bien à l’exercice de la casuistique juridique) effectué en violation de RoE en vigueur stipulant par exemple que les opérations ne seront pas menées si l’absence de civils à proximité de l’objectif n’est pas confirmée au préalable (quoi qu’on puisse penser par ailleurs d’une telle règle). Supposons également que l’objectif ait été détruit et que les dommages collatéraux ne soient pas disproportionnés par rapport à l’avantage militaire tiré de cette destruction. L’autorité militaire ou des ayants-droit peuvent-ils en déclenchant l’action publique, ou en se constituant partie civile, faire valoir la violation des RoE en vigueur au soutien de leur demande[23] ?
Cette question reste pendante et ne pourra trouver de réponse qu’avec une décision judiciaire qui indiquera si les RoE peuvent être assimilées aux consignes au sens de l’article 465 du code de justice militaire[24]. Aucune décision n’est à ma connaissance intervenue en la matière. Qualification pénale spécifique du code de justice militaire, la violation de consignes est sanctionnée de deux ans d’emprisonnement.
Dans l’hypothèse où cette question recevrait une réponse négative, il conviendrait de s’interroger sur la prise en compte au procès pénal de cette violation supposée. Compte tenu de leur statut juridique actuel, les RoE encore une fois sont assimilables à une instruction ministérielle ou un règlement professionnel. Leur violation en tant que telle ne devrait donc pas servir de base à une poursuite pénale, mais simplement à une sanction disciplinaire. Cependant rien n’interdit de penser que cette violation pourrait comme fait être invoquée à l’appui de poursuites sur le fondement des articles 221-6, 222-19 NCP (manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, maladresse, imprudence, négligence ayant conduit à des coups et blessures ou homicide involontaire). Des parties au procès ne devraient de nouveau corrélativement pas pouvoir s’en prévaloir selon la jurisprudence applicable[25], sauf encore une fois comme élément de preuve.
2.2 Le juge administratif et les RoE
Il n’entre pas dans le propos de cet article de détailler les conséquences en matière indemnitaire et devant le juge administratif de l’observation ou de l’inobservation des RoE. Il suffit ici de rappeler qu’il n’y a pas de raison que cette question soit résolue selon des solutions différentes de celles adoptées en matière de faute de service ou détachable du service, sous réserve de la théorie des circonstances exceptionnelles et à l’exception de la question des dommages de guerre[26].
En revanche la question de la validation par le Président de la République ou par une autre autorité appartenant à l’exécutif d’un profil de RoE peut être brièvement abordée.
La PIA 05.203 prévoit qu’une autorité politique, selon les cas, Président de la république, Premier ministre ou Ministre de la Défense valide les profils de RoE proposés par le CEMA. Cette validation peut-elle être assimilée à un acte de gouvernement insusceptible de recours pour excès de pouvoir, au sens de la jurisprudence administrative ?[27] La jurisprudence ne donne pas de cette notion un contenu théorique défini mais en matière militaro-diplomatique elle a admis que l’ordre de brouiller les émissions d’un poste étranger[28], la création d’une zone de sécurité dans les eaux internationales pendant des essais nucléaires[29], ou encore la décision de reprise des essais nucléaires[30], constituaient des actes de gouvernement, et on peut penser que la décision d’approbation d’un concept d’opérations (CONOPS) pourrait être qualifiée comme tel.
Dans cette mesure, le contrôle du juge se limiterait à la seule appréciation de la conformité aux traités internationaux et conventions internationales[31] des mesures d’approbation prises par l’exécutif.
Cependant une autre limite est fixée par la jurisprudence à l’immunité de juridiction de l’acte de gouvernement : le juge accepte de se prononcer sur les mesures qu’il qualifie de « détachables » de l’exercice des relations diplomatiques, par exemple, sur la destruction par la marine nationale d’un navire abandonné en haute mer[32]. De ce point de vue, on peut défendre l’idée que l’approbation au Conseil de l’Atlantique Nord d’un profil de RoE pour une opération ou la conduite des opérations elle même constitue un ensemble de mesures qui ne peut-être apprécié indépendamment de ses incidences en matière de conduite des relations internationales (cf schéma p 3), n’est donc pas détachable de cet exercice, et constitue probablement un acte de gouvernement insusceptible d’examen au contentieux, sous réserve de conformité au droit international, comme il a été dit plus haut.
3. les RoE et la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (CEDH)
La CEDH et les obligations qu’elle met à la charge des Parties sur les territoires où elles exercent leur juridiction[33] ont en règle générale ou devraient avoir un retentissement certain sur la conduite des opérations ou la matière des RoE. Il n’entre cependant pas dans les objectifs de cette brève étude de faire un point exhaustif des contraintes que fait peser la CEDH sur la formulation de RoE.
L’article 2 pose en principe le droit à la vie, et en principe intangible sa protection sauf en trois cas limitativement énumérés[34]. L’administration de la mort dans ces trois circonstances est cependant soumise au critère de l’absolue nécessité, ce qui a des conséquences inévitables en matière de RoE du temps de paix.
Pour ce qui concerne les opérations militaires et non plus de police, l’article 15 prévoit en son alinéa 1, dans le cadre plus général des exceptions à l’application de la Convention, que de manière dérogatoire « toute Haute Partie Contractante pourra prendre des mesures dérogeant aux obligations prévues par la présente Convention, dans la stricte mesure où la situation l’exige et à la condition que ces mesures ne soient pas en contradiction avec les autres obligations découlant du droit international ». Une lecture même superficielle conduit à imaginer que le contrôle du juge européen des Droits de l’Homme s’exerce le cas échéant sur ces deux conditions.
L’alinéa 2 de l’article 15 précise que « la disposition précédente n’autorise aucune dérogation à l’article 2 sauf pour le cas de décès résultant d’actes licites de guerre (…) », étant précisé que ces dérogations doivent faire l’objet d’une information du Secrétaire général du Conseil de l’Europe. C’est semble-t-il sous ces conditions de fond et de forme[35] que le critère de l’absolue nécessité de l’article 2 et les circonstances qu’il exige peut-être temporairement aboli.
Dans cette mesure, une déclaration du catalogue du ou des profils de RoE valables pour une opération[36] à l’autorité plus haut désignée pourrait être envisagée quand une intervention est décidée sur un territoire où s’exerce la juridiction d’un Etat contractant.
Dans sa décision Berhami c/ France et Saramati c/ France, la CEDH a cependant limité l’application de la CEDH aux seules circonstances dans lesquelles les Etats parties agissent sans mandat onusien. En effet, lorsqu’ils agissent sous mandat onusien, ils ne disposent alors plus directement du contrôle effectif sur le territoire visé par le mandat ; autrement dit, l’action ou l’omission des forces ne sont alors pas directement imputables aux Etats mais à l’ONU, qui dispose d’une personnalité juridique distincte de celle de ses membres. Or, l’ONU en tant qu’entité juridique autonome, n’est pas partie à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
[1] Cette proposition permet d’abord de faire l’économie de la notion de provocation qui figure dans certaines des définitions OTAN, UE et française, dont le contenu juridique ou opérationnel n’est pas clair et qui n’est pas utile à la définition des règles d’engagement : elles comprennent toutes les actions et utilisations légales des moyens des forces armées en opposition éventuelle à une autre force.
Par ailleurs elle évite la mention d’éléments de définition négative (ce que les RoE ne sont pas) qui peuvent ou pouvaient également être trouvés dans les définitions du MC 362 0TAN et les documents correspondants de l’Union Européenne ou des Nations Unies.
[2] Le MC 362 de l’OTAN est le plus connu. Il a servi de base à la rédaction du modèle européen (Use of Force Concept for EU-led Military Crisis Management Operations ESDP du 20 novembre 2002) et français (PIA 05.400) de ROE.
[3] L’Article 422 du code de justice militaire édicte ainsi bel et bien, même négativement, une règle d’engagement et la sanction de son inobservation :
« Est puni de la destitution tout commandant d'une formation, d'un bâtiment de la marine ou d'un aéronef militaire qui, pouvant attaquer et combattre un ennemi égal ou inférieur en force, secourir une troupe, un bâtiment ou un aéronef français ou allié poursuivi par l'ennemi ou engagé dans un combat, ne l'a pas fait lorsqu'il n'en aura pas été empêché par des instructions générales ou des motifs graves. »
[4] Cf également le L 2238-3 du Code de la défense (ex articles 96 et 174 du décret du 20 mars 1903, leur conformité à l’article 2 de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales a été par contestée, ce qui a milité pour un éclaircissement par voie législative de la question) régissant les conditions d’ouverture du feu pour les gendarmes qui fixe de manière précise certaines règles d’engagement pour ces militaires () et Crim 18 février 2003 -critère de l’absolue nécessité- voir note sous cet arrêt au Dalloz du 20 mai 2003 où le commentateur explique que «c’est un véritable mouvement d’uniformisation des règles d’engagement qui se dessine » .
[5] Dans les conditions prévues par la production interarmée sur les règles d’engagement.
[6] Actuellement, voir cependant dans un contexte de développement limité du droit des conflits armés le fameux « Tuez les tous ! Dieu reconnaîtra les siens ! » qui aurait été proféré par Arnaud Amaury, légat du Pape au siège de Béziers en 1258 et constitue bien uen règle d’engagement.
[7] L’exemple de la guerre américaine au Vietnam le démontre particulièrement bien. Il était absolument interdit aux avions de chasse d’attaquer les objectifs militaires suivants :
- toute installation au nord du 19ème parallèle
- toute base aérienne ou autre site désigné comme sanctuaire
- tout chasseur ennemi n’ayant pas rentré son train d’atterrissage
- tout chasseur ennemi ne démontrant pas d’intention hostile
- tout site de défense contre aéronef non activé,
Un missile devait être tiré contre l’aéronef pour qu’il soit autorisé à tirer à son tour. Les manquements constatés valaient la cour martiale à leurs auteurs.
[8] Il s’agit parfois du droit militaire applicable. Ainsi le concept en droit pénal de la plupart des états américains est très proche de celui du droit français alors que l’acception de la légitime défense selon le droit militaire américain comprend la réaction à l’intention hostile et à l’acte hostile soit une légitime défense « préemptive ».
[9] Ce qui devrait conduire au non lieu ou à la relaxe en cas de poursuites cf infra.
[10] Cf ci-après les différents cas d’exonération prévus par le droit pénal français.
[11] Se rend coupable du délit prévu par l’article 63 al 1er du Code pénal (nouveau 223-6) le gendarme qui laisse exercer en sa présence des violences sur un détenu par des gardes placés sous ses ordres (Crim 23 mars 1950).
[12] Crim 1er juin 1965, Crim 24 octobre 1983.
[13] La question de l’applicabilité du droit français et de la juridiction française à des faits commis à l’étranger est de principe en droit français et sera traitée ultérieurement. Cf article 59 (code de justice militaire) et articles 113-3, 133-4, 113-6 du NCP. Les accords de statut des forces peuvent remettre ce principe en question comme d’ailleurs le droit local (conflit positif de compétence).
«Sous réserve des engagements internationaux, le tribunal aux armées connaît des infractions de toute nature commises hors du territoire de la République par les membres des forces armées (…) .»
[14] l’ordre de la loi ne suffit cependant plus cf Crim 18 février 2003 : il convient d’y ajouter en matière de police l’impossibilité d’accomplir autrement son devoir. Voir aussi CEDH Mc Cann et autres, 27 septembre 1995.
[15] Cour d’assises Paris 30 avril 1957, en matière de visa pharmaceutique ou plus proche, Crim 22 juin 1994 affaire du sang contaminé.
[16] le statut d’instruction ministérielle donné au corps des RoE françaises, pour celles au moins qui n’ont pas d’autre statut normatif (législatif ou réglementaire) ne modifie pas la situation juridique : seule la loi, en matière de crimes et délits, définit les causes d’exonération en matière de responsabilité pénale.
[17] Il doit être combiné avec les exigences de l’Article 447 (code de justice militaire)
«Est puni de deux ans d'emprisonnement tout militaire ou tout individu embarqué qui refuse d'obéir, ou qui, hors le cas de force majeure, n'exécute pas l'ordre reçu.
L'emprisonnement peut être porté à cinq ans si le fait a lieu en temps de guerre ou sur un territoire déclaré en état de siège ou d'urgence, ou à bord d'un bâtiment de la marine militaire dans un incendie, abordage, échouage ou une manoeuvre intéressant la sûreté du bâtiment ou à bord d'un aéronef militaire.»
[18] ce que sont nécessairement les crimes contre l’humanité (Crim 23 janvier 1997)
[19] l’ordre donné à des militaires d’achever un prisonnier blessé ne peut en aucun cas constituer un fait justificatif , (Ch Accus Paris, 28 février 1994 non publié).
[20] Sauf s’il peut-être démontré en fonction du matériel utilisé qu’une présomption forte selon laquelle une séquence de tir automatique a été enclenchée existe. Serait-ce un avatar de « Messieurs les anglais, tirez les premiers ! », autre (négativement) règle d’engagement fameuse ?
[21] la conception française de la légitime défense semble être également celle des Nations Unies cf Article 51 de la Charte qui stipule que « Aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un Membre des Nations Unies est l'objet d'une agression armée, jusqu'à ce que le Conseil de sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales. »
[22] note du professeur Danièle Mayer (Sorbonne-Paris I) sous Crim 19 novembre 2002.
[23] Il faut convenir que dans cette hypothèse et en vertu de la règle du non-cumul, seule l’infraction la plus sévèrement condamnée pourra donner lieu à condamnation et ce n’est pas la violation de consignes.
[24] L’ Article 465 (code de justice militaire) semble pouvoir s’appliquer aux hypothèses de violation des RoE :
«Tout militaire qui viole une consigne générale donnée à la troupe ou une consigne qu'il a personnellement reçu mission de faire exécuter ou qui force une consigne donnée à un autre militaire est puni de deux ans d'emprisonnement. La peine d'emprisonnement peut être portée à cinq ans si le fait a été commis en temps de guerre ou sur un territoire en état de siège ou d'urgence ou lorsque la sécurité d'un établissement militaire, d'une formation militaire, d'un bâtiment de la marine ou d'un aéronef militaire est menacée. La peine d'emprisonnement peut également être portée à cinq ans lorsque le fait a été commis en présence de bande armée.».
[25] Cf Ch crim 18 juin 1969 qui précise qu’une instruction ministérielle ne peut être considérée comme une source du droit pénal, en matière de preuve d’une infraction : des prélèvements ayant été effectués sans respecter l’instruction ministérielle en vigueur, la Cour de cassation refuse toute valeur contraignante à ce texte. Voir également loi du 10 juillet 1993.
[26] Nécessairement prévus par un traité ou une loi.
[27] Il convient de souligner que le profil de RoE ne se trouve pas dans le concept d’opération (CONOPS) mais uniquement dans le plan d’opération et ne sera pas en tant que tel proposé à la décision de l’autorité politique…
[28] TC 2 février 1950 Radiodiffusion française.
[29] CE !@#$%^&*. 11 juil 1975 Paris de Bollardière.
[30] CE !@#$%^&*. 29 sept 1995 association Greenpeace France.
[31] cf CE !@#$%^&*. Dame Kirkwood 30 mai 1952, CE !@#$%^&*. 20 oct 1989 Nicolo.
[32] Cf. CE Sect. 23 oct 1987 Société Nachfolger navigation
[33] Depuis l’arrêt Bankovic et Alii c. Etats membres de l’OTAN du 12 décembre 2001, la Cour européenne des droits de l’Homme considère que la juridiction dépend du « contrôle effectif » d’un territoire et donc, des populations s’y trouvant. Cette définition dépasse donc la dimension territoriale en vertu de laquelle la CEDH n’est compétente que vis-à-vis des violations commises envers des individus se trouvant sur le ressort d’un Etat ayant ratifié la Convention et qui s’est rendu responsable des violations.
[34] Défense des personnes contre violence illégale= légitime défense, arrestation régulière ou mesures prises pour mettre fin à une évasion. On réservera le cas de la mort infligée dans le cadre de la répression autorisée par la loi d’émeutes ou d’insurrections qui n’interesse pas immédiatement les armées mais surtout la gendarmerie. Il convient de noter que l’état de nécessité n’est pas cité parmi les causes licites de l’homicide…
[35] S’agit-il d’une formalité substantielle ?
[36] Qui constitue bien sous certains de ses aspects l’organisation de la violence légale..